Marathon de Marseille (18mars / 42km)


Bonjour courageux lecteur [j'annonce la couleur: ça risque d'être un peu long... mais fallait bien que ce récap' soit marathonesque..],

 

Aaah le Marathon de Marseille. Ce Marathon de Marseille, pour moi, il ne commence pas dimanche 18 mars, à 8h, aux Goudes; il débute le mardi 2 janvier avec mon inscription, et surtout le lendemain, le long du canal EDF, à Charleval, où je décide de commencer à m'entraîner, vraiment m'entraîner, avec comme vague objectif, deux mois et demi plus tard, d'y 'faire quelque chose'..

 

Je ne faisais presque plus que du trail, du court, du long, du très long, et j'avais envie de refaire un marathon, recourir un 42,195km, cette distance mythique, qui est en quelque sorte une distance-étalon qui parle à tout le monde, où il n'y a pas de dénivelé, de technicité du parcours, de pierriers, de descentes boueuses ou quoi que ce soit, une distance 'pure', où le 1er kilomètre est identique au 20ème, qui est identique au 39ème.. une distance courue partout dans le monde, universelle. Une distance que j'avais déjà parcourue quatre fois, sans parler donc des formats plus longs, en trail ou même sur route (avec Millau notamment) où il n'y avait pas de ligne d'arrivée au bout de 42,195 kms. Mon dernier marathon c'était celui de Salon, en 2016, avec un record perso' à la clef de 3h17m, sachant que mon tout premier je l'avais fait en 3h54, à Paris, il y a 10 ans.

 

Je voulais 'y faire quelque chose', parce que des marathons, et bien je n'en courrai plus des centaines, ou même des dizaines. Et en vieillissant (si, si..), ben on ne gagne pas trop en vitesse.. Pour chiffrer ce 'quelque chose', je savais qu'il n'y avait plus trop à rogner sur mon meilleur temps. J'étais vraiment en forme fin 2016, j'avais bien couru.. et j'étais donc plus jeune.. [soupirs..]. Bon bref, en réfléchissant et calculant un peu (la marathon c'est assez scientifique..), je voulais viser moins de 3h15. Moins de 3h15, ça faisait du 13km/h de moyenne. 13km/h sur plus de 42 kms ce n'est pas rien quand même. Moins de 3h15, donc 3h14. Donc Pi. Bah oui, Pi, π, 3,14. Et pour y arriver, ce n'est pas bien dur (euh..), c'est même mathématique: faut faire chaque kilomètre en 4 minutes et 37 secondes (oui, oui).

 

L'objectif était donc clair et net, restait à faire le nécessaire pour y arriver, avec 10 semaines de 'boulot' devant moi.

 

J'en ai parlé à Serge, alias Coach Sergio, qui m'a préparé un véritable plan d'entraînement, chose que je n'utilisais pas pour mes précédents défis, mes charges d'entraînement n'ayant jamais été bien lourdes.. Un plan d'entraînement aux petits oignons, évidemment parfaitement scientifique connaissant Serge. Un plan sous forme de tableau Excel que Serge m'envoyait en début de semaine et que je lui renvoyais remplie une fois cette semaine passée, survécue.. Certaines n'étaient en effet pas de 'tout repos', c'est le moins que l'on puisse dire, avec des sorties longues bien sûr (jusqu'à 30kms) mais surtout ces satanées séances de fractionnés, douloureuses, seul, le long du canal EDF toujours. Des séances courtes, longues, toujours exigeantes. Des séances qui me faisaient hélas souvent rater nos entraînements classiques, entre Taureaux. Mais je savais que c'était temporaire et qu'il fallait serrer les dents pour qu'ensuite, le jourJ, ça se passe comme espéré. Donc je faisais chaque séance sans exception, et ça qu'il pleuve ou qu'il vente. D'ailleurs une des dernières séances nous l'avons faite ensemble avec Serge, à deux, sous une vilaine pluie, dans l'obscurité, pris par la nuit. Morts après ces séries de sprints de 200m, chacun à son niveau, nous étions contents du travail effectué, et confiants dans la réussite du projet qui se rapprochait de plus en plus.

 

Il va sans dire que je le remercie énormément pour son aide et implication dans ce défi. Son plan d'entraînement était béton et ses conseils précieux. Merci Coach, tu mérites un sifflet d'or.

 

Bon, les semaines passent et voilà qu'on y est enfin au dimanche. Pffiouw, enfin oui; après toutes ces semaines j'avais vraiment hâte d'en découdre avec ces satanées 42 bornes-et-quelques.. Je l'ai dit, l'approche du marathon était scientifique, calculée. Contrairement à n'importe quelle course de village ou trail, là je savais exactement à quelle vitesse/allure partir. Je connaissais par avance mon temps au bout de 1km, au bout de 10, au bout de 25. Bon, ok, après ça allait être moins évident et certain; après.. et bien après c'était l'inconnu, après c'est là où commence véritablement le marathon, c'est la découverte: allais-je pouvoir tenir l'allure fixée tout le long, allais-je pouvoir répéter 42 fois le même temps au kilomètre..? (oui, on est loin de la spontanéité (et peut-être du plaisir) du trail, même si évidemment sur marathon aussi on peut courir au feeling, tranquillement, sans calculer.. mais ce n''était pas ma démarche sur cette épreuve où, pour une fois j'avais un objectif chronométrique).

 

On le sait, c'était le projet Pi, soit 3h14 au final, mais, dans les derniers jours, on s'était mis d'accord avec Serge, de partir encore plus ambitieusement: 3h14 signifiait 4mn37 au km [désolé pour ceux qui détestent les chiffres..], là j'allais partir/aller plus vite: 4mn30 au km. Evidemment 7 secondes sur 1 km ça peut sembler anecdotique, mais c'est loin de l'être.. et au final cet écart entraîne bien sûr une différence de plus en plus importante: 1mn10 après 10km, 2mn20 après 20, et, si on va jusqu'au bout, 5 minutes à l'arrivée, avec un temps non pas de 3h14 et quelques.. mais de moins de 3h10.. C'est quand même un monde d'écart (si, si, vraiment). Oui, la démarche était ambitieuse, risquée, mais bon, je ne m'étais pas entraîné pour rien, et, on l'a dit, je ne vais pas en faire des centaines encore de marathons..

 

Allez, jour J. Sur le Vieux-Port, encore très tranquille, et où le soleil se levait tout juste, à 7h du matin, soit 1h avant le départ, je quittais Fred' pour prendre la dernière navette qui allait m'emmener jusqu'aux Goudes, lieu de départ de ce Marathon de Marseille. J'étais bien content d'être parmi les derniers arrivés sur place: il y faisait assez froid, à cause d'un vilain vent venant du nord. Aie, le vent je le craignais. Là encore ça ne peut sembler qu'un détail, mais un gros vent défavorable ça entraîne plus d'énergie pour tenir la cadence, déjà élevée, une énergie qui pouvait ensuite bien manquer lors des derniers, plus compliqués, kilomètres.. Mais bon, ça c'était un facteur incontrôlable, il fallait faire de son mieux, qu'importe les conditions, on verrait bien à la fin ce que ça donnerait.

 

Je me suis mis dans mon sas, celui annoncé par avance à l'organisation, le sas des 3h15. Les sas juste devant nécessitaient des justificatifs de performances et étaient donc réservés aux cadors, parmi eux il n'y avait qu'une poignée de coureurs élite et /ou internationaux, le Marathon de Marseille n'étant pas un des plus courus et propices aux gros chronos.. (oh zut..). C'est là où je me suis rendu compte que je n'avais pas écrit, comme je le faisais lors de mes sorties longues, mes temps de passage sur ma main (oui, oui). Zut, mais bon, l'allure choisie était simple: 4mn30s/km, donc 9mn pour 2 km, et ainsi de suite. On a bien fait de laisser tomber les 4mn37, beaucoup plus compliqués niveau calculs..

 

Il y a eu un retard dans le coup de départ de la course (comme l'année passée apparemment), c'est à 8h-et-quelques que la meute (constituée d'environ 1100 marathoniens) fut lâchée. Je déclenchais ma montre, et ma puce déclenchait mon chrono officiel en passant sur le tapis de départ. Directement je me suis mis dans mon rythme, ce fameux rythme de 4mn30/km, soit 13,33 km/h en instantané sur la montre. Evidemment je ne tenais pas compte des coureurs autour de moi qui décidaient de partir à balle ou d'immortaliser tout ça avec leurs appareils photos. J'avais un objectif, précis et calculé, fallait resté concentré dessus. Bon, naturellement ça ne m'a pas empêché de lever dans la tête du goudron quand même, et heureusement: la vue était déjà splendide. Oui il y avait du vent, mais au moins la matinée était ensoleillée, ça donnait des paysages magnifiques, surtout côté mer bien sûr.

 

1er km de bouclé: 4mn32. C'est bon. Non, non, ne vous inquiétez pas, je n'allais pas m'en vouloir pour 2 secondes quand même.. surtout que ce 1er kilomètre était vallonné. Et ça, c'était un autre point -avec le vent- qui remettait un peu en cause la 'scientificité' du projet: le dénivelé. Normalement, un marathon a zéro dénivelé ou presque. Là, c'était loin d'être le cas. Je le savais, tout le monde le savait (ce n'est pas pour rien que les cadors sont peu nombreux: ce n'est pas propice aux records), mais c'était pire que craint par avance. Mais bon, fallait faire avec ça aussi, comme pour le vent, en espérant que l'énergie dépensée n'allait pas manquer au final, quand on allait rentrer dans le dur..

 

Pour l'instant, c'était loin d'être le cas -sauf quand une rafale nous tombait dessus-, je passais au 2km en 9 minutes (parfait), au 5km en 22mn30 (nickel), au 10km en 45mn (good), tout allait bien. Je me sentais bien, j'étais content d'y être enfin et peut-être même que j'avais déjà hâte d'arriver au 30ème km, là où l' 'aventure' allait commencer. Mais avant fallait les faire les bornes qui m'en séparaient. L'allure de 4mn30/km était soutenue bien sûr, mais je m'étais entraîné dessus, je connaissais, ça passait. Mais tous ces kilomètres, même passés dans le rythme espéré, allaient bien sûr petit à petit peser dans les jambes et diminuaient irrémédiablement mes forces.. Je faisais bien sûr attention à bien m'hydrater, en prenant quasiment à chaque fois une petite bouteille d'eau aux ravitaillements, même si ce n'était que pour quelques gorgées. En guise d'alimentation, j'avais pris sur moi 3 petites barres Gerblé (d'amande, de banane et de figue), et une pâte de fruit, au cas où, pas de gels ou autres stimulants pour moi..

 

Petit à petit, il y avait de moins en moins de coureurs qui m'entouraient. En fait, dès les premiers kms ça s'était étiré et à mon allure il n'y en avait pas trop des coureurs (plusieurs devaient être dans celle permettant 3h, d'autres dans celle pour 3h15, où un meneur d'allure officiel donnait le tempo). Pas grand monde apparemment n'était parti sur un 'Projet Pi', comme c'est étonnant.. Du coup, je me suis assez rapidement trouvé seul, ce qui n'est vraiment pas étonnant dans un (long) trail, mais beaucoup plus lors d'un marthon. En même temps, sur celui-ci il n'y avait pas des dizaines de milliers de coureurs comme à Paris,  Barcelone ou Florence. Quoi que: fallait pas oublier qu'il y avait un semi-marathon aussi d'organisé, et un 10km également. Autant je n'allais pas croiser les coureurs du 10 (qui ne partaient qu'à 11h), autant avec ceux du semi on allait plus tard se croiser et recroiser, vu le parcours alambiqué, qui comportait plusieurs aller-retour et une boucle courue 2 fois. J'ai donc plus couru entouré de coureurs du semi (et ça se voit sur les photos, dossards rouges) que de coureurs du marathon. Etre seul pour ma course, dans mon allure, avait l'inconvénient bien sûr de ne pas être entrainé/motivé par un groupe, mais par contre, me permettait de rester scotché aux temps fixés, seul avec mon chrono.

 

Le parcours passe par le stade Vélodrome, puis la longue avenue du Prado, puis par le Parc Borély, que j'ai découvert pour l'occasion, une première fois au 15ème, une seconde fois au 30ème. Bien sûr on peut regretter que le parcours répète une même boucle d'une dizaine de kms, mais l'avantage toutefois est que ça permet de connaître le tracé qui nous attendra pour les kilomètres fatidiques du marathon, les 12 derniers.. Aie, je découvre du coup que ce n'est pas très plat tout ça, avec beaucoup de vent dès qu'on retrouve la mer. Le pire c'est sur la corniche, où ça monte et ça souffle.. Dommage parce que sinon ce serait le plus beau passage, grace à la magnifique vue bien sûr.

 

Mais bon, ça va toujours. Je passe la barrière du semi-marathon (21km) en 1h35m et quelques secondes, j'arrive toujours à tenir le rythme de 'marche' (à quelques secondes près, c'est vrai..). Là, en longeant la corniche, je commence à songer au Vieux-Port déjà et au km 25, où normalement une petite Tortue devrait se trouver. Avant de la retrouver elle, on retrouve beaucoup de public dans le centre-ville, c'est bien plus animé que lors du départ des navettes à 7h du mat'. Là, Marseille est réveillé et se fait entendre. Ca fait du bien, on est encouragés, et encore plus quand avec un dossard bleu on tournera à droite pour repartir pour un tour, plutôt qu'à gauche comme les dossards rouges qui en finissent de leur semi-marathon, bande de chanceux. C'est à la séparation d'ailleurs que j'aperçois, dans une grande foule bruyante, Fred', elle a l'appareil photo et me bombarde tout en m'encourageant. Je la salue, lui fais un bisou volant, je suis bien, sourire aux lèvres (on le voit sur les photos), ça me sort de ma bulle d'effort et de concentration, où le bitume et les temps intermédiaires donnés par ma montre m'accompagnent.. (merci pour ta présence petite Tortue)

 

Après la bifurcation, on quitte donc tous les coureurs du semi et on se retrouve quasiment seul. Derrière moi il n'y a personne il me semble (je ne me suis jamais retourné) et devant moi y'avait quelques marathoniens, esseulés, au loin. Du coup, on a l'impression que la route, la rue de Rome en l'occurrence, a été privatisée pour notre petite personne. Pendant quelques minutes on (..enfin moi tout du moins..) se met dans la peau d'un champion qui court seul devant, acclamé par la foule, avec les policiers qui nous ouvent la voie.. Bon, la réalité est tout autre, même si les encouragements du public, personnalisés parfois (on a notre prénom sur le dossard) font chaud au coeur. On retrouve la Place Castellane, où les coureurs du 10km, en attendant leur départ, nous encouragent. C'est top et je suis bien.. Enfin, plutôt pas mal.. Oui, je sens que j'ai quand même quelques bornes dans les jambes, presque 30 et que je ne suis en fait plus très frais.. C'est en quittant l'euphorie générée par le public et qu'on se retrouve avec une longue avenue (du Prado) devant nous, qu'on se rend compte que ça commence à être dur quand même et qu'elle ne va pas être facile cette affaire..

 

Bon, j'arrive au 30ème, à l'entrée du Parc Borely pour la 2nde fois, et regarde la montre: 2h15mn16s. C'est toujours bien, en théorie ça devait être 2h15, mais ça va.. chronométriquement en tout cas.. Parce que physiquement, en fait, ça commence à être dur. J'avais déjà un peu senti mon genou, mais c'était passé. Et il y avait un km où j'avais mis 5 secondes de trop, mais je l'avais compensé lors du suivant, avec moins de dénivelé surement. Or, en fait, la réalité était que j'étais pas mal entamé. C'est terrible le marathon et son bitume, ça use progressivement, petit à petit, surnoisement même. Et le vent n'arrangeait pas les choses.. Allais-je rencontrer le 'mur' du marathon..? Ahlala, ceux qui l'ont connu ne l'oublient pas, souvenirs-souvernirs par exemple pour quelques Taureaux qui ont fait celui de Salon...

 

Le km 31 je l'ai fait en 4mn35.. aie. Le km 32 en 4mn35 aussi.. aie aie. Le km 33 en 4mn35 à nouveau, malgré mon envie bien sûr de me rattraper.. Aie aie aie! Péril en la demeure.. 15 secondes de perdues en 3 kms, sans rien pouvoir y faire. S'ajoutant à cela le léger retard que j'avais déjà accumulé, on commençait à s'approcher d'un temps de 3h11 plutôt. Oui, évidemment cela peut sembler très dérisoire, 3h10 ou 3h11 on s'en fout on pourrait dire.. et bien non, pas moi, je voulais faire le meilleur temps possible, avec toujours la connaissance que je n'en ferai plus des dizaines (à ce rythme surtout). Bon, après, j'arrivais à relativiser quand même: l'objectif de base ça restait Pi, 3h14, et pour ça on était encore bien..  Allez, il reste moins de 10 bornes et donc 45 minutes a priori, il faut tenir, en serrant les dents.

 

Par contre, je constate que je ne suis pas le seul à être dans le dur. Certains le sont bien plus même, eux rencontrent le fameux 'mur' et semblent s'y fracasser. Malgré mon allure à la baisse, je double quelques coureurs esseulés. En fait, il n'y a dans mes environs qu'un seul marathonien (les autres ce sont des coureurs du semi, peu rapides, qui finissent à leur rythme) qui arrive à tenir la cadence et arrive à lutter contre cette baisse de régime qui semble nous affecter tous. Ce gars au débardeur blanc et aux chaussettes montantes noires, je ne vais plus le lâcher, je vais m'accrocher à ses baskets, jusqu'au bout... enfin, je vais essayer..

 

Le km 34, il/on le fait en 4mn29, yes, c'est reparti! Le km 35, en 4mn27, re-yes! Le km 36 en .. 4mn35.. Aaargh, merde, on baisse à nouveau de rythme. Bon, ce n'est pas un hasard si ce km c'est celui le long de la corniche, en montée avec vent défavorable.. Y'a rien à faire, avec 35kms dans les jambes je n'arrive pas à lutter. Le prochain ce sera pareil, celui d'après aussi, et après encore: toujours le long de la côte, pour remonter jusqu'au Pharo. Les kms les plus durs. Et, hélas, les temps le confirment: le km 37 je le fais en 4mn et... 50 secondes! Ohlala, là ça ne va vraiment plus. J'ai l'impression de courir au maximum, mais ça n'atteint plus les 13km/h.. C'est horrible, je donne tout ce que j'ai mais le prochain km confirme la (mauvaise) tendance: 4mn42. Putain, je suis en train de m'éffondrer. Je suis en train de rencontrer ce fichu mur et je vais m'écraser dessus. Là, j'essaye d'analyser et me dis que le dénivelé accumulé depuis le dépuis et le vent contre qui j'ai lutté, et bien ils m'ont imperceptiblement usé, plus que supportable apparemment pour bien finir ces dix derniers kms. Par contre je me dis aussi que c'est de l'énergie qui me manque et que je n'ai pas tant mangé que ça en 2h30, j'ai toujours pris de l'eau, mais pas à manger. C'est donc, aussi, un manque d'alimentation. Vite je mange la moitié de ma pâte de fruit.

 

Tout ça se fait tout en continuant à essayer, coûte que coûte, de suivre ce gars en débardeur blanc. On reprend deux ou trois marathoniens, sans compter les dizaines de semi-marathoniens qui marchent parfois. Du coup, je me dis que le rythme doit sûrement ne pas être trop mauvais, mais c'est un leurre, la montre vibre et affiche la cruelle réalité: 4mn49 pour ce 39ème km. Là je ne suis pas loin de paniquer en me disant que désormais ce sont les 3h14 qui sont menacés.. On oublie 3h10 évidemment, par contre je ne peux pas renoncer à ces 3h14, pas après toutes ces séances d'entraînement durant des semaines, pas après toutes ces bières refusées durant cette période, mais surtout pas après toute l'aide de Sergio et la patience de Mlle Tortue pendant ces deux mois.

 

J'suis donc au plus mal, sans énergie, avec des douleurs un peu partout (satané bitume), mais [ou peut-être: du coup] je réagis. Je serre encore plus les dents, lutte encore plus contre les éléments, et décide d'y aller, de foncer, quitte à exploser. Je décide de dépasser mon 'lièvre' au débardeur blanc.. ainsi que tous les autres gens sur mon passage.. Maintenant, faut plus réfléchir, plus calculer, plus regarder la montre, faut être fort, plus fort que la douleur.

 

J'avais hâte d'y être dans ces derniers kilomètres décisifs? Et bien là j'y suis, donc maintenant faut se battre. On arrive au 40ème km (j'apprendrais plus tard que je l'ai couru sous les 4mn30, yes!), fini, on quitte donc enfin la côte (c'est beau.. mais bon, là, je veux retrouver le centre-ville), on se dirige vers le Vieux-Port. Le couteau entre les dents, la respiration forte, je continue à lutter pour avancer. Je suis obligé de slalomer entre les nombreux semi-marathoniens, quasiment à l'arrêt, ce qui n'est pas idéal. Il y a une dernière montée, je me bats pour ne pas trop baisser de rythme. Je rattrape encore 3-4 marathoniens, plus morts que moi donc apparemment. Je semble aller très vite, entouré de coureurs/marcheurs qui trottinent pour rallier l'arrivée. Le public, de plus en plus nombreux avec le Vieux-Port en vue, m'encourage. Je pense qu'il lit sur mon visage aussi bien la douleur que la hargne [la photo n°16 en témoigne bien]. Allez Stef, continue, à ce rythme là, ça va le faire. Tu ne t'as pas effondré, c'est donc bon pour les 3h14, maintenant faut grignoter un max de secondes pour afficher un joli temps. Un temps dont je pourrai être fier (..un temps peut-être aussi qui ne m'obligera pas à refaire un marathon prochainement, non, pitié..). J'ai littéralement les dents serrés, quand je passe le panneau des 42kms. (Ce km, ma montre m'apprendra que je l'ai couru en 4mn05, quasiment à 15km/h donc).

 

Plus que 195 mètres. Le public crie, il voit un 'dossard bleu' sprinter comme un forcené. On fait le tour du Vieux-Port, la ligne d'arrivée est devant l'hôtel de ville. Je sprinte, ne vois pas ce qu'il y a devant ou autour de moi, j'entends juste hurler et un speaker crier. Je ne vois ni Fred' me prenant en photo en rafale, ni les photographes officiels postés devant nous. Je ne vois pas le gros chrono accroché en haut de l'arrivée. Je vois juste la ligne fatidique, celle de l'arrivée, celle qui est séparée de la ligne de départ par 42195 mètres.. Je la franchis les bras levés, le poing rageur. J'arrête mes jambes endolories ainsi que ma montre (oui, ça doit être un réflexe sur le coup). J'essaye de reprendre mon souffle, ça va, ça revient vite. Evidemment je regarde enfin ce qu'affiche ma montre: et là je découvre, avec un sourire qui devait surement être un peu béat: 3h10mn54. ... Je suis encore trop 'chaud' pour exulter, mais je suis content. Vraiment content. L'objectif du Projet Pi a été atteint. L'objectif de faire un 'beau temps' (tout est relatif bien sûr..) qui me satisfasse, est atteint. YES!

 

On m'offre ma médaille (celle-là elle aura une place de choix) et une dame me demande mes impressions sur ce marathon.. "Le parcours est vraiment beau... mais pas facile quand même"..

 

Une fois de retour à la maison, je découvre mon diplôme de finisher: je finis donc en 3h10mn54s, soit 57ème sur 1077. Je découvre aussi sur mon téléphone tous les messages d'encouragement et déjà ceux de félicitation. Un grand merci pour tout ça, ça m'a fait très plaisir. J'en profite pour envoyer un message chambreur à nos deux trailers du Ventoux, Seb' et Jean-Marie: 'Les gars, moi j'ai fini, j'ai une bière à la main, alors que vous vous êtes encore les pieds dans la neige, encore en plein effort' (énorme bravo à eux, ils ont vaincu le Géant de Provence).

 

Voilà, ça clôture cette aventure 'retour au bitume', qui a donc débuté début janvier. On va aller s'amuser sur des trails à nouveau.. mais le bitume et le marathon j'y reviendrai. Parce que c'est beau quand même. Non, non, Serge, s'il-te-plaît, ne parlons pas d'un nouveau plan d'entraînement.. Repos d'abord.. Euh, repos de courte durée d'ailleurs, il me semble que dans moins de deux semaines, le 1er avril -ce n'est hélas pas une blague- il y a un petit trail qui m'attend déjà, un 72 bornes.. Bon, là on va y'aller sans montre, mais avec appareil photo..

 

Stephane

 

(Bravoooo: tu es finisher de ce compte-rendu-marathon, tu mérites médaille & diplôme.. Avec un tel courage tu pourrais facilement t'attaquer au marathon justement... Quoi, ça ne t'a pas donné envie..?)

 

 

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Commentaires: 8
  • #1

    3.14 (mercredi, 21 mars 2018 13:00)

    Bravo la blonde !

  • #2

    jerome (mercredi, 21 mars 2018 14:35)

    super résumé comme d'habitudute.

    Bravo pour cet exploit quand même.

    l'année prochaine, je fais enfin le marathon de Marseille. ils vont modifier le parcours! oui car il fallait être un peu maso ! faire deux fois la corniche avec ce vent....

    ps: je t'ai encouragé prés de Castellane, on s'échauffer pour le 10km.


  • #3

    Laëtitia (mercredi, 21 mars 2018 16:49)

    Magnifique récapitulatif et bel exploit sportif.. tu es capable de tout.. en attendant le prochain.. bises

  • #4

    Genevieve (mercredi, 21 mars 2018 16:52)

    Félicitations pour ce compte rendu et ce marathon bien couru, finalement au 21°km tu étais à la moitié de ton temps, donc course très régulière super. Belles photos. Bises à vous deux

  • #5

    Fred (mercredi, 21 mars 2018 22:52)

    C'est avec tout impartialité que j'affirme que ce recap est certes long mais top! On ressent les différentes émotions par lesquelles tu es passé ( on a l'impression de le vivre mais comme pour les recaps des deux Seb, c'est un truc de fou, ça donne envie de recrapahuter au plus vite).
    C'est un plaisir de t'accompagner petit Crapaud, c'est vraiment chouette de partager ces "relevages" de défi!
    Bisous d'une tortue doublement fière

  • #6

    Daniel (jeudi, 22 mars 2018 07:07)

    Merci pou ce récap et énorme bravo pour ta course . Finir sur un sprint de 3 km c'est pas donner à tout le monde sur ce type de distance . L entraînement y est pour beaucoup mais aussi ta force de caractère. . Bravo Stéphane.

  • #7

    Amelie (jeudi, 22 mars 2018 20:32)

    On le vit ce marathon grâce à ta superbe récap !(d'ailleurs maintenant qu'on sait ce que c'est plus besoin de se préparer pour en faire un !) ....Vraiment bravo pour ta perseverance et ce super beau chrono ! Encore une belle leçon de courage !

  • #8

    Cedric (dimanche, 01 avril 2018 17:49)

    Beau Recap, et bravo pour cette belle médaille.
    Ne t’inquiète pas, maintenant le coach va ce défouler sur mon programme ;-) !!!
    Maintenant tu vas pouvoir venir prendre une bière avec nous et avant de commencer ma prépa !!!!!
    Bises champion et encore bravo!!!